Les Petites Broutilles (1)
...écrites par Noëmie
Arbre:
Pieds enracinés dans les profondeurs de la terre
bras élancés vers le ciel
les arbres ont des silhouettes de créatures hésitantes
lorsqu'on les surprend nus.
Automne:
Désir insensé de retarder l'hiver ou coquetterie de vaniteuse,
l'automne s'effeuille par fragments minuscules
dans le doux bruissement d'un vêtement qui tombe.
Bas:
Chrysallide de soie où glisser ses jambes
et laisser voler la promesse de tous les possibles...
Cactus:
Totems sauvages hérissés dans le désert,
vous semblez avoir choisi la morsure du soleil et la dureté des pierres
pour envoyer les hommes se chercher d'autres divinités à honorer.
Coquelicots:
Fragiles allumeuses,
jupons retroussés à tous les vents,
qui jouent à provoquer le cueilleur
avant de rétracter pudiquement
le froufrou froissé de leurs robes rouges.
Coquillage:
La petite sirène s'est encore cassé un ongle.
Etoile filante:
Etincelle de vie criblée dans la nuit.
Dernier sursaut de lumière au bord de l'essoufflement.
Flammes:
Silhouettes insaisissables de danseuses argentines,
vous faites crépiter vos talons sur un parquet de braises
et tournoyer vos robes incendiaires au rythme du brasier.
Le flamenco expire à petit feu
dans un rougeoiement d'étincelles et de robes qui se consument.
Galet:
Le savon préféré de la mer.
Celui avec lequel elle s'est tant frottée que personne ne sait plus
qui de l'eau ou de la pierre
renferme ce parfum de sel et d'embruns.
Grains de beauté:
Les pointillés que ma peau te laisse
l'air de rien
pour indiquer le chemin à tes baisers.
Mascara:
C'est du velours posé sur les yeux,
une traîne derrière laquelle se cacher les prunelles.
Mobiles:
Colliers de perles, de coquillages, de verroteries et de breloques, que l'on accroche au cou de sa maison. Cliquetis de pendeloques dans un courant d'air, reflets de lumières sous une caresse de soleil: un peu de coquetterie à domicile.
Neige:
Les nuages ont déployé leur traîne de mariée
et saupoudré de dentelles la nature endormie.
En un battement de ciel, fleurs sauvages et mauvaises herbes
ont revêtu des habits de reine.
Nuages:
Petit bonheur fugace de soudain lever les yeux au ciel
et de se perdre dans un paysage de mer inversée.
Le temps d'un regard, la réalité s'altère;
Un océan d'écume au-dessus de la tête.
Nuit:
En enfilant sa robe du soir, la nuit a dû briser sa rivière de diamants.
La gorge mise à nue et ses brillants répandus aux quatre vents,
il ne lui restait plus qu'à piquer sur son corsage
une broche d'opale aux reflets de pleine lune.
Robe:
Glisser ses hanches dans une corolle de soie rouge
et espérer qu'un homme veuille bien l'effeuiller.
Joli paradoxe de ces pétales éphémères:
les robes sont faites pour être enlevées.
Verre à pied:
Un petit verre de table qui a voulu faire sa coquette
et chausser des talons le temps d'un repas.
Vert:
Teinte vive des rizières,
Petit trésor de verre poli que les vagues déposaient à mes pieds quand j'étais petite,
Odeur des beaux jours qui accompagne l'herbe fraîchement coupée,
Caresse suave et poivrée de la feuille de menthe dentellée que je pose sur ma langue,
Minuscule perle de lumière que le ver luisant fait briller dans les jardins en été,
Couleur de la robe que je mets pour faire briller ses yeux,
Goût acidulé des noisettes que l'on a voulu croquer trop tôt,
Mariage miraculeux des couleurs de la mer et du soleil.